Je vous propose aujourd’hui une version annotée de l’article de Guillaume Sire pour Ina Global “Lutte fratricide dans les coulisses du web”. C’est mon boulot de communiquer sur ce que fait W3C et dans le cas de cet article, on nous a refusé d’accéder au texte en avance pour proposer des corrections si nécessaire.
Vous trouverez mes réponses et commentaires sous forme de monologue avec mes initiales en préfixe, dans des éléments blockquote
.
J’ai précédemment écrit sur le blog du W3C, de manière officielle, neutre et dépassionnée, quant à toutes les inquiétudes dont on nous a fait part à propos d’EME.
CM : Ah bon ? on traverse une crise ? J’ai cru que la crise était passée suite à la publication d’EME en tant que recommendation.
CM : Par où commencer ? …Le concept d’implémentation de DRM au sein des standards du web est faux.Quant à invoquer l’esprit des pionniers d’Internet, j’ai juste envie de rappeler que Tim Berners-Lee, inventeur du Web, est le directeur du W3C (entre autres) et qu’il se bat pour le bien de sa création avec ferveur.
Sommaire
- – Le W3C, une instance de standardisation peu connue des internautes
- – Les défis du W3C
- – Encrypted Media Extensions : chronologie d’une controverse
- – Demain, le contrôle des pages ?
- – La sécurité, autre problème majeur
- – La standardisation du code HTML se fera-t-elle demain ailleurs qu’au W3C ?
CM : Hmm, et où se pose-t-elle donc ?
Le W3C, une instance de standardisation peu connue des internautes
CM : Vingt sur vingt. Zéro faute.
Pour la suite, je ne vais relever que ce qui est incorrect.
CM : Oui.
CM : Non, pas vraiment. Les acteurs concernés sont à la table de la standardisation parce qu’ils sont concernés. De ce fait, ils agissent en conséquence.
CM : C’est un détail, mais “six mois” n’est pas réaliste, aussi, aucun groupe n’est lancé pour une telle durée. Par contre, on étend volontiers des groupes existants pour six mois afin leur permettre de finaliser leur travail.
CM : Je note que je n’ai aucune idée de qui sont ces auteurs, de quoi ils sont auteurs, ni même d’où ils qualifient l’inventeur du Web de dictateur.
CM : Qui est cet auteur qu’on nous présente en expert sans le présenter ? Quels sont ses références et qualifications ?Il ne fait pas partie de groupes de travail au W3C (*), ni n’est un représentant du Comité consultatif.(*) Il est cependant participant d’un des W3C Community Groups, groupes ouverts au public permettant entre autres d’incuber des technologies et spécifications pour les porter officiellement à l’attention de tous via un groupe de travail.
Les défis du W3C
Encrypted Media Extensions : chronologie d’une controverse
CM : Ce que cet article ne dit pas c’est que l’EFF aussi a rejoint le W3C à ce moment-là et pour la même raison. Et c’est bien.
CM : Spéculation.
CM : Lettre ouverte à laquelle non seulement le W3C a répondu, mais qu’il a clarifiée et corrigée.
World Wide Web Consortium abandons consensus, standardizes DRM with 58.4% support, EFF resignshttps://t.co/BzocbhWGLl pic.twitter.com/4cRGDW4ejQ
— Cory Doctorow (@doctorow) 18 septembre 2017
CM : Pas grand-chose, non.Juste l’accessibilité aux personnes handicapées, l’intéropérabilité, la sécurité. Des broutilles, quoi.Sans EME, c’est retour aux plug-ins inaccessibles, exposés à des failles de sécurité, et dont la plupart ne fonctionne que sur certaines plate-formes.Je vous invite à lire la liste des avantages qu’apporte EME, ainsi que le document d’information accompagnant le communiqué de presse, relatant tous les éléments essentiels autour d’EME.Par contre, vous n’y trouverez rien de dramatique ou de sensationnel.
Demain, le contrôle des pages ?
CM : Notez bien que “sur le web” est le mot-clé, ici et représente la nouveauté. Ce qui se faisait via plug-in se fait désormais sur le Web.Je vais vous laisser relire cette phrase.Ne tombez dans le piège tendu par l’auteur qui sous-entend que le contrôle passe aux mains des producteurs de films. Ils ont le même contrôle, ni plus ni moins.Ce qui change est la plate-forme. En déplaçant toutes les interactions dans les navigateurs Web, elles sont protégées des failles de sécurité des plug-ins.
CM : Ah mais, ça commence à bien faire avec les sous-entendus, les exagérations et les demi-vérités !
CM : Non, ce n’est pas un project actuel. Le groupe de travail a mis “DRM” dans la section “hors cadre” de sa charte de travail.
CM : À vrai dire, ce groupe existe depuis le printemps 2017.
CM : Je trouve le paragraphe ci-dessus bien sensationnel alors qu’aujourd’hui et depuis des années de telles passerelles payantes existent sur le Web. Le Web a vocation à contenir tout autant de contenus gratuits, que de contenus payants.
La sécurité, autre problème majeur
CM : Tout ce que je peux dire publiquement à ce sujet c’est que plusieurs versions d’un accord formel ont été étudiées, que ça a pris de longs mois en toute bonne foi –et que Jeff Jaffe a œuvré en ce sens–, que toutes ne provenaient pas que de l’EFF et que cette dernière a tout autant rejeté les versions non satisfaisantes que les autres membres du W3C.
La standardisation du code HTML se fera-t-elle demain ailleurs qu’au W3C ?
CM : En pratique aussi, tout le monde est invité. La section “wide review” du processus du W3C prévoit de faire savoir publiquement les avancées et d’inviter tout retour.
Il n’est pas impossible toutefois que d’autres protocoles voient le jour, dans d’autres arènes, écrits cette fois par les défenseurs de la libre circulation et de la neutralité du réseau. On peut très bien imaginer que des arènes de normalisation se mettent en place en marge du W3C, comme ce fut déjà le cas du Web Hypertext Application Technology Working Group (Whatwg) créé en 2005 à l’époque où Tim Berners-Lee ne jurait que par le XHTML et le web sémantique alors que certains développeurs voulaient détrôner l’hégémonie de Flash en matière d’interactivité et créer pour cela le HTML5. D’ailleurs, le fondateur du Whatwg, Ian Hickson, dès le premier jour où il en a été question, s’est opposé de manière virulente à l’EME. Il ne serait pas étonnant par conséquent qu’il accueille l’EFF à bras ouverts au Whatwg.
CM : Le WHATWG travaille sur une toute petite partie des technologies Web.
Le W3C c’est 235 spécifications en développement actif, dont 200 visent le statut de Recommandation. C’est 36 groupes de travail en parallèle et 13 groupes d’intérêt qui s’occupent de tous les aspects du Web. Tous ces groupes suivent un modèle de revue et vérification transverse afin d’assurer une prise en charge en matière d’accessibilité pour les handicapés, de sécurité et d’internationalisation.
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Crédit :
Illustration : Ina – Yann Bastard